Anecdotes 90 ans – Le symbole de Grenoble

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  • En octobre, nous allons nous intéresser au téléphérique comme symbole de la ville de Grenoble.
    Stendhal disait « au bout de chaque rue, une montagne », mais aujourd’hui il serait aussi possible de dire « à chaque coin de rue, les Bulles » !

Florilège pour s’envoler dans le temps

Il faudrait arriver à se replonger dans l’ambiance de 1934, se souvenir que l’aviation est débutante et les sports d’hiver (avec leurs remontées mécaniques) balbutiants. Et là, dans la ville de Grenoble, on installe un téléphérique au départ du centre de la ville et accessible à toutes et à tous. Cette expérience de l’envol, des pieds qui se détachent du sol est absolument nouvelle, inédite, exceptionnelle. Pour la très grande majorité de la population c’est une découverte inattendue.

De nombreux articles de presse témoignent de cette sensation. Vous trouverez ci-contre un florilège de quelques-unes de ces phrases piochées dans ces articles. Etes-vous prêt pour un voyage dans le temps suspendu au câble de notre téléphérique ?

Le téléphérique est de la navigation aérienne.
(La Dépêche Dauphinoise / 10 septembre 1934)

Une véritable initiation aux émotions aériennes (…) Le passage au pylône ondule de la plus agréable façon.
(Le Petit Dauphinois / 10 septembre 1934)

Confiez-vous à la nacelle bleu de roi (…) et voici que, sans bruit, du quai de l’Isère (…) vous êtes délicatement soulevé, enlevé et sous vos pieds se détachent (…) le Rabot, puis les bastions, puis les redans de la Bastille.
(Le Salut Public / 29 septembre 1934)

La nuit (…) C’est d’un effet saisissant. La terre et le ciel se mélangent dans le désordre d’un étrange scintillement.
(L’écho de Paris / 30 septembre 1934)

Le trajet présente un spectacle comparable à celui que l’on a d’un avion.
(La Dépêche Dauphinoise / 30 septembre 1934)

La « sainte fatigue » de la marche en montagne aura décuplé le plaisir de la descente en téléphérique.
(La Dépêche Dauphinoise / 6 octobre 1934 / Signé par Le Marcheur Inconnu)

Mettre, en quelques sortes, les Alpes à la portée de tous.
(Le Matin / 9 octobre 1934)

Je me suis alors laissé tomber avec la cabine dans le vide.
(La croix de l’Isère / 23 octobre 1934)

Ascension dans un fauteuil.
(République du Sud-Est / 12 juin 1935)

La plus sensationnelle des attractions.
(Le Dauphiné / 28 juillet 1935)

Comme si d’un bond on s’élevait de 300 mètres.
(La Tribune des Nations / 20 décembre 1935)

Michoudettes et Boules à Doudou

Téléphérique ? Chemin de fer aérien ? Ficelle grenobloise ? Pendant quelque temps, dans la presse, toutes ces dénominations co-existent. Il en va de même pour les cabines appelées parfois bennes ou wagons.

Mais la palme revient aux grenoblois qui surnommèrent les toutes premières cabines les « Michoudettes » du nom de Paul MICHOUD, initiateur du projet en 1934. Coïncidence, en 1976, quand le téléphérique acquière sa silhouette en bulles, il semblerait que dans certains milieux (notamment au CENG, maintenant CEA) on affubla notre tout nouveau téléphérique du sobriquet de « Les Boules à Doudou ». Référence à Hubert DUBEDOUT, alors maire de Grenoble.

  • On rase gratis !

    Nous sommes en 1935, le téléphérique est ouvert depuis quelques mois. Comment en faire la promotion auprès des grenoblois ? Comment vous y prendriez-vous ?

    Il faudrait trouver un endroit dans lequel tout le monde (ou presque) se rend et où l’on parle, où l’on échange, où l’on papote, où l’on véhicule les derniers potins. Les coiffeurs ! Le 5 juin 1935, opération de communication en direction des coiffeurs : tous les coiffeurs grenoblois (patrons et employés) reçoivent des bons gratuits pour un voyage à la Bastille par le téléphérique.

  •  Bulletin Mensuel, en 1935.

Écumer la ville

Que feriez-vous si on vous disait : S’il-vous-plait, dessine-moi Grenoble.

Facile, entre trois et cinq disques côte à côte, alignés dans un mouvement ascendant. A partir de là, toutes les variations sont possibles, faites l’expérience, cherchez le Club de Pétanque de Grenoble, le Club plongée de Grenoble, ou même le Badminton Club de Grenoble. D’autres osent le mélange de symboles accrochant sous le câble une noix entre deux bulles. Reconnaissons qu’avec la SNCF, c’est possible. Des vitrines entières de tasses, théières, beurriers, salières… à l’effigie des bulles se dénichent ici et là dans de ville. Plus loin, un bar renverse ses verres-ballon et les transforme allégoriquement en téléphér-hic ! Même, les plus rebelles, ceux qui pendant le sommeil des citoyens taguent, graffent, décorent la ville, ne peuvent pas s’empêcher de représenter les bulles, ici sur un mur ou là sur un panneau de signalisation… Personne n’y échappe… Autant de bulles à chaque coin de rue, ce n’est plus une ville que nous habitons mais une écume de ville !

Les bulles dans la ville de Grenoble, en 2024.

Problème de couple

Quand on parle de problème de couple dans un téléphérique, c’est généralement pour évoquer un défaut mécanique, un manque de puissance, un problème de motorisation. Mais, un article daté du 18 août 1947 dans Les Allobroges, nous relate un problème bien plus humain. Ainsi M. LEVEQUE, alors cabinier, raconte avoir assisté à une scène très déplaisante durant laquelle un jeune homme aurait menacé sa jeune épouse (ils étaient mariés depuis huit jours) de la défénestrer depuis la cabine. Si l’anecdote nous apprend peu de choses sur la nature humaine, en revanche, elle nous permet d’en savoir un peu plus sur le téléphérique qui ne possédait pas de vitre. Ou, plus précisément, les vitres étaient déposées l’été et réinstallées l’hiver.

Plus réjouissante est notre seconde histoire de couple qui fut conseillé, de la meilleure des manières, par une psychologue grenobloise. Ce couple était peut-être à la limite du déraillement, ils n’avaient pas encore pété un câble mais ils n’arrivaient plus à atteindre les sommets. Ils ne savaient plus dire ce qui était porteur ou tracteur dans leur vie de couple. Ils avaient l’impression d’être tous les deux assis sur un quai à attendre que quelque chose se passe. Tous les paysages leur apparaissaient mornes et plats. Comment remettre du pétillant dans cette vie commune ? Pétillant ! Mais oui, ce qu’il vous faut, c’est des bulles ! Prescription : Habillez-vous en tenue de soirée, une belle robe, un beau costume, des souliers vernis, munissez-vous d’une bouteille de champagne, montez à pied à la Bastille en vous tenant par la main, arrivés en haut, buvez le champagne (surtout pas de verres en plastique !) et redescendez en Bulles. Grisés par le champagne, transportés par les Bulles, le vertige amoureux est revenu au sein du couple et les paysages de la passion se sont réouverts.

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